
Histoire vécue Bali Décembre 2019
En rentrant d’une course du côté de Bali, j’ai vécu une série de situations étranges mais qui, comme d’habitude m’ont édifiée et que j’aimerais partager avec vous.
Au sortir du magasin, alors que j’attendais un taxi, un vieux vêtu d’un pull blanc à capuche, vint me bousculer comme si c’est moi qui n’ai pas fait attention, et me dit en Bassa’a « yon yihè ha man wem » (fais attention mon enfant) et il continuait sa route sans regarder derrière.
Il marchait en s’appuyant sur son tongo (sa canne)
Il marchait lentement on sentait un grand père fatigué
Il avait gardé sa main gauche dans la poche et la chose qui m’a marquée, c’est la tâche blanchâtre sur la face interne de son poignet droit.
Il portait les sans-confiance aux pieds. J’ai pu voir qu’il était clair de peau…
Au départ j’ai cru qu’il s’agissait d’un attardé mental mais son allure soignée et ses pas délicatement posés au sol m’ont fait comprendre qu’il était encore lucide. Certainement le n’sogol (grand-père) de quelqu’un qui prenait de l’air…
Quelques secondes plus tard, un taxi s’arrêta tout juste devant moi.
– Ndokotti deux places 1000f
– Piiipp (comme pour valider)
Il y avait un homme au siège passager, et un autre derrière.
– S’il vous plaît chauffeur j’aimerais occuper le siège passager sans être bâchée.
Le conducteur et le passager de devant ont discuté pendant quelques secondes et il est descendu me cédant la place.
Dans le taxi
Moi : Bonsoir
Eux : Bonsoir
Passager X, : Hum ma fille tu as une belle voix hein, tu es journaliste ?
Moi : Non non
Chauffeur : elle parle français avec douceur comme ça, c’est sûr qu’en anglais sa voix change
Rire…
Moi : ma voix reste la même
Passager X : Ha donc tu parles aussi bien l’anglais ?
Moi : Just a little
Passager X : et à part le français et l’anglais tu parles quelle autre langue étrangère ?
Moi : je voulais dire Espagnol, mais pour ne pas poursuivre cette conversation qui devenait ennuyeuse, j’ai répondu aucune.
Petit moment d’évasion , je ne cessais de penser à la scène d’il y’a quelques minutes. Ce vieillard qui m’a bousculée semble-t-il exprès, me demandant de faire attention… mais attention à quoi ?
Et quand mes esprits revinrent , les passager et le chauffeur sont en pleine conversation en espagnol.
J’entends dire derrière dans une phrase
Passager Y : …Es muy carnosa … (elle est bien charnue)
Passager X : une longue phrase que je n’ai pas comprise, et ensuite El gousto del jefe (le goût du boss)
Le chauffeur au téléphone
« Buenas noches chefe… » banalités d’usage et ensuite « te treamos la comida de navidad… » (on t’apporte le festin de Noël). Rire aux éclats avec ses collègues et au bout de quelques mots, il raccrocha.
Je me mis à paniquer tout en gardant un air serein et distrait
Mon sang ne fit qu’un tour
Mon cœur se mit à battre la chamade
Et là je me suis rappelée cette mise en garde de ce vieux « yon yihè ha man wem »
Mais qui est-il ? D’où vient-il ?
Hier en rangeant mes albums photos je suis tombée sur une photo de mon grand-père maternel décédé le 26 décembre dernier à (environ) l’âge de 105ans (il est né pendant la 1e guerre mondiale)
On l’appelait « Monsieur le blanc » à cause de son teint qu’il à gardé jusqu’à sa mort et surtout, son coté maniaque. Sa couleur préférée était le blanc, et même au soir de sa vie, son environnement était toujours propre. D’ailleurs au jour de sa mort, il portait un vêtement blanc.
Quand j’ai revu cette photo de grand-père j’ai coulé des larmes en invoquant son nom dans mon cœur, lui confiant mes projets et ma vie. Qu’il veille sur mes pas et m’apparaisse en songe des fois.
Pour qu’on puisse regarder le catch comme de son vivant…
Grand-père avait sur son bras droit une large tâche de vitiligo, il me disait que c’était le signe précurseur d’un enfant albinos dans sa ligné, et j’ai cru voir cette tâche sur le bras de ce n’sogol , le bras qui tenait le tongo.
Et si c’était grand-père qui m’était apparue pour me mettre en garde ?
Il était clair que ces hommes préparaient un coup qui sentait mauvais et il fallait absolument que je sorte de cette voiture. Mais comment ?
Arrivés à ancien Dalip le chauffeur emprunta la rue Pau qui sort derrière Garantie Express. Cette rue est pour moi l’une des plus sombres de la ville de Douala.
Toujours dans la panique, j’ai simulé un malaise
La main au ventre « weee le porc ci me veut quoi ? La femme là a mis quoi dans sa nourriture comme ça ? Chauffeur pardon je veux vomir »
Passager X : « no debe salir » (elle ne doit pas sortir)
Moi : en toussant les salives à la bouche, orientée vers le chauffeur, ça giclait sur lui « attends d’abord je vomis pardon, ça veut sortir
Chauffeur : « et tu veux vomir sur qui ? » dès qu’il à garé, je suis sortie à grande vitesse et à 2m du taxi j’ai d’abord balancé « ustedes brujos » (espèce de sorciers ),avant de rebrousser chemin en courant et en criant « à l’aide … »
Ils mirent le turbo et disparurent.
Puisque cette rue n’est pas très praticable et pratiquée, ce n’est qu’après 2min de course que je vis un bensikineur à qui j’expliquai la situation et qui a bien voulu me déposer à destination.
…
Mes parents m’ont éduquée dans la foi chrétienne mais il y’a ce coin en moi qui s’interroge sans cesse et me rapproche de nos cultures. Jésus est là, mais nos ancêtres sont encore plus proche de nous. Et avec ce qui m’est arrivée ce soir, j’en suis davantage convaincue.
Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que ce genre de situation m’arrive . Quand je n’étais pas encore blogueuse, ma grand-mère décédée il y’a plus de 10ans m’a sauvée d’une situation encore plus grave que je vous raconterai peut-être un jour.
Aussi , faisons des choix par passion et non par mimétisme. J’étais une passionnée de l’espagnol au secondaire, et c’est ce qui m’a sauvée aujourd’hui. C’est vrai que je suis pour le remplacement de ces langues dites vivantes par nos langues maternelles dans nos programmes académiques, mais vraiment, ne négligeons jamais ce qu’il nous est donné d’apprendre , on ne sait pas ce qui va nous sauver demain.
Faites très attention avec le dehors ces jours ci, et restez vigilants… Le malin rode et cherche encore plus de proies.
Binkù la Nerveuse (j’ai eu chaud… Meyega wè ngandack ha n’sogol BIKAÏ, Ntoñ ni ntoñ)